« A la fois plein de science et de candeur, grave et souriant, Denis Fernand Py, artiste d’un autre âge comme égaré en plein XX° siècle, s’est offert, le 10 janvier 1887, la charmante fantaisie de naître dans une modeste maison versaillaise, rue du Hasard. En plus de son enfance difficile la génétique, comme pour l’isoler d’un monde paraissant ne pas être fait pour lui, lui fait don d’une semi surdité. Mais de bonnes fées, peut-être même des anges, déposent en son berceau mille et un dons précieux : un goût exquis, une inaltérable fidélité à son œuvre comme à ses amis, la modestie, la courtoisie, l’amour de « l’ouvrage bien faite », une curiosité sans cesse en éveil. Et don suprême, une extraordinaire finesse d’esprit lui permettant de tout comprendre spontanément, et de tout juger, même en des domaines qui, par nature, lui étaient étrangers comme la musique, la littérature ou l’art dramatique.
Laborieusement, il fait son apprentissage de sculpteur à Paris, chez les fabricants de meuble du faubourg Saint Antoine. Du bois il passe sur l’ivoire en exécutant, pour des antiquaires, des copies rivalisant de perfection avec d’anciennes pièces servant de modèle. Ainsi l’une de ses statuettes, une vierge en ivoire est authentifiée par un expert venu tout exprès d’outre-Rhin. Il la certifie du XII° siècle et lui découvre même de secrètes influences chinoises. Ceci, preuve irréfutable des talents du jeune sculpteur, fait réfléchir les collectionneurs les plus avertis.
Fernand Py ne se satisfait pas de cette ingrate besogne. Bientôt il rivalise avec les maîtres du moment, édifie selon leur exemple une œuvre totalement personnelle. Son doux entêtement lui permet de rire des premières épreuves et, depuis son appartement parisien du 25 Bd du Temple, d'élaborer son propre style issu du labeur et de l’acharnement. Soutenu sans faiblesse par sa fidèle épouse Jeanne Riquet qui partage sa confiance et sa foi, il persévère durant plus de quarante années. Henri Charlier en fait son compagnon de travail et lui communique son esprit. Puis, d’année en année plus assuré de sa force et de son génie, Fernand Py devient maître à son tour et forme des élèves.
En 1920, indépendant par sa pensée et son expression, il rejoint l’Arche, groupe d’artistes en révolte contre l’académisme de l’art religieux.
En 1921, il vient habiter pour les beaux jours sa maisonnette du hameau de Sommeville près d’Auxerre. Il y aménage un atelier pour mieux travailler à son œuvre.
Alors, les commandes deviennent de plus en plus nombreuses. Si nombreuses qu’à la fin de sa vie il ne pourra toutes les honorer. De semaine en semaine, de mois en mois, il a la joie de créer de nombreux chefs-d’œuvre, qu’il sculpte dans le bois ou l’ivoire et taille parfois dans la pierre. Certaines années il exécute une cinquantaine de pièces nouvelles qui, en un long cortège de saintes et de saints, viennent enrichir de modestes collections particulières, ou de plus riches comme celles de musées, églises et abbayes, pour des pères ou des prêtres, des évêques ou des papes
Fernand Py est aussi ce dessinateur prodigieux, léguant des cartons entiers d’études, de peintures et d’aquarelles connues d’un petit nombre de privilégiés, amis et familiers. Ces originaux méritent une attention particulière, et lui-même leur attribue un grand prix.